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Le dilemme de la yaourtière, ou comment parler CO₂ aux enfants

Cette année, le dilemme de la yaourtière a occupé la rentrée familiale. Ayant magistralement échoué l’an dernier à réduire nos déchets plastiques en fabriquant à domicile les goûters des enfants – cette résolution a sombré dans les paquets de biscuits surempaquetés –, nous avons décidé de nous attaquer à une autre pollution domestique : le pot de yaourt. L’objectif semblait clair pour chacun des quatre membres de ma tribu, de 6 à 48 ans : la poubelle est pleine de pots. Or, personne ne sait pour l’instant recycler les 15 milliards de pots en polystyrène vendus chaque année en France. Si bien que se passer du contenant sans se passer du contenu nous a semblé le juste défi du moment.
C’est à l’annonce du prix d’une yaourtière douze pots, à 129 euros, neuve, sur un site d’électroménager, que ma fille de 10 ans a commencé à raisonner. « Il va falloir acheter la machine, puis du lait, puis de l’électricité, ça va faire beaucoup plus cher que des yaourts », a-t-elle décrété. Dans un moment de folie, j’ai tenté d’enchaîner : « Sans compter qu’il faudrait d’abord savoir si le bilan carbone de cet engin est valable par rapport au bilan carbone de notre consommation de yaourts. » L’intégralité de ma famille s’est dispersée avant la fin de ma phrase. Je n’ai même pas tenté de les retenir. Car comment expliquer à mes jeunes enfants que nos fins de repas sont liées au climat, notamment par la production de lait, issue des vaches, mais aussi par le plastique, un dérivé du pétrole, avec lequel sont fabriqués les pots de yaourt ? Que ce matériau est responsable de près de 3,4 % des émissions mondiales de CO₂ ? Emissions qu’il s’agit de diviser par cinq d’ici moins de vingt-cinq ans si l’on ne veut pas carboniser notre avenir commun ?
En élargissant la focale, je me demande bien comment leur faire comprendre que chacun de nos objets et la plupart de nos actions consomment de l’énergie et, donc, émettent des gaz à effet de serre dans l’atmosphère – à raison de 10 tonnes en moyenne par Français et par an – qui participent au réchauffement planétaire ?
Comme j’ai moi-même mis de nombreuses années à comprendre dans le détail ces liens de causalité, l’obstacle me semble insurmontable. Je ne suis pas la seule à buter dessus. « C’est la question qui nous obsède : ce sont des sujets complexes, techniques et parfois très déconnectés de la réalité des enfants. On a testé de très nombreux outils avant de trouver les bons », me console Guilhem Papa, le directeur du pôle pédagogique de l’Académie du climat, une structure municipale parisienne pionnière dans l’éducation aux questions environnementales, en particulier en direction des jeunes publics.
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